Monsieur le ministre, vous sollicitez notre avis sur un projet de décret qui modifie profondément l’organisation de la semaine scolaire. Celle-ci fait suite à la décision que vous avez prise sans consultation du Cse de supprimer le samedi matin et de réduire de deux heures de classe la durée hebdomadaire.
Cette décision s’effectue dans un contexte qui est marquée par une profonde inquiétude des personnels vis à vis de l’avenir de l’école. Le contexte budgétaire avec la volonté de ne pas remplacer le départ en retraite d’un fonctionnaire sur deux, l’insuffisance des créations de postes pour faire face à la hausse du nombre d’élèves mais aussi les annonces sur les résultats prétendument catastrophiques de l’école qui serait responsable à elle seule des difficultés du système éducatif, un projet de programme concocté dans le secret sans s’appuyer sur l’expérience des professionnels, des stages de remise à niveau, des annonces sur l’enseignement de la Shoah, qui là aussi ne s’appuient aucunement sur le travail des enseignants des écoles, l’annonce de la publication des résultats scolaires école par école jettent le trouble sur la politique éducative mise en oeuvre à l’Education Nationale.
Les dispositifs envisagés à la suite de la suppression de la classe le samedi matin, la réduction de deux heures d’enseignement pour tous les élèves, l’allongement de la journée scolaire pour certains ne peuvent résoudre les difficultés lourdes que rencontrent certains élèves. Le dispositif conduira à augmenter les inégalités entre les écoles et entre les personnels.
Pour le SNUipp, la transformation de l’école et la nécessité de faire réussir tous les élèves constituent une exigence majeure. Celle-ci appelle au contraire davantage de créations de postes dans le premier degré pour diminuer le nombre d’élèves par classe, permettre ainsi la mise en place de dispositifs nouveaux avec plus de maîtres que de classe, plus de temps de concertation pour le travail en équipe et sans réduire le temps scolaire pour tous les élèves.
Le traitement des difficultés scolaires doit relever d’une prise en charge individuelle en petits groupes ou collective pendant le temps de classe. Elle doit être pensée sur le temps des apprentissages au sein de la classe en s’appuyant sur les RASED qui doivent être développés.. A ce titre, le seul regroupement après la classe d’élèves ne peut constituer une solution pour les élèves qui rencontrent les difficultés les plus lourdes. C’est un désaccord de fond avec vos propositions.
Les résultats des consultations que nous avons organisées confirment avec force la volonté des enseignants de bénéficier d’un temps plus important pour travailler en équipe et la nécessité de prendre en compte l’accroissement de la charge de travail dans le temps de service.
Si l’avis des enseignants des écoles a été partagé sur l’annonce de la suppression de la journée du samedi ( 61% pour et 36% contre ), de l’efficacité de la prise en charge hors du temps de classe (53 contre et 42 favorables), de la suppression des deux heures (42 pour et 55% contre) en revanche les modalités mises en oeuvre à travers le relevé de conclusions et l’ensemble du dispositif sont jugés inacceptables par trois enseignants de s écoles sur quatre. De même 76% des enseignants des écoles pensent que le dispositif des 60h ne peuvent aider à résoudre les difficultés d’apprentissage des élèves.
Depuis l’ouverture des discussions, huit réunions de concertation ont eu lieu entre les organisations syndicales. Malgré l’intégration du temps de préparation dans les 60 heures, l’intégration dans le temps de service de la mise en place des PPRE et PPS, la reconnaissance du rôle du Conseil des maîtres dans l’élaboration du dispositif , le dispositif provoquera un accroissement des inégalités (entre écoles, élèves et enseignants) en matière d’aides, de temps de formation et de concertation. Le "plus de maîtres que de classes" n’a pas été évoqué.
De plus ce dispositif soulève toujours de multiples questions : Comment adapter l’offre des aides aux besoins constatés qui varient selon l’école, en ZEP ou non, le niveau d’enseignement, le type de poste occupé ? Comment articuler ce temps de soutien avec les activités extra-scolaires sportives ou culturelles des élèves ? Avec les études dirigées ? Que deviendront les heures qui ne seront pas utilisées en soutien pour les enseignants ? Quelles conséquences en zone rurale avec le ramassage scolaire ?
Les fortes inquiétudes qui existent sur la formation continue et le rôle des rased ne sont pas dissipées.
La consultation que nous avons réalisée fait apparaître que les enseignants trouvent inacceptables les modalités du dispositif et que les propositions retenues à l’issue des discussions sont totalement insatisfaisantes. Près de 80 % considèrent que ces mesures ne correspondent ni à l’ambition de faire réussir tous les élèves, ni aux besoins des écoles et des enseignants.
C’est donc, au vu des résultats de cette consultation et face aux réponses insuffisantes en matière de temps de concertation que le SNUipp a décidé de ne pas signer le relevé de conclusions et ne votera pas le projet de décret présenté.